La perversion narcissique et le narcissisme grandiose sont une défense contre un sentiment de honte inconscient. La personne qui manifeste ce trouble évite de le conscientiser en projetant ce sentiment inconscient en l'autre grâce à la dévalorisation, au mépris, à l'indifférence, au silence-radio, à l'insulte, au déni, ....
Le sujet pervers narcissique fait souffrir pour ne pas souffrir par des humiliations répétées, un harcèlement moral quotidien de la victime. Il se défend ainsi de la souffrance liée à la honte. Le trouble de la personnalité narcissique se manifeste par une arrogance, une volonté de pouvoir sans limites et un besoin excessif d’être admiré. Il protège l'individu de la honte.
L'absence de remise en question, le mensonge maintient son pouvoir sur la relation. La manipulation constante d'autrui lui permet de mettre à distance ses émotions, particulièrement la peur d'être incapable, nul, sans valeur.
La honte est un sentiment qui résulte d’une non-adaptation à certaines exigences sociales, que ce soit au niveau des codes sociaux, de l’image, de l’apparence physique, ou d’attitudes collectives, comme par exemple, le mépris pour la grosseur. Le sentiment de honte se différencie des autres sentiments par sa dimension sociale, narcissique, corporelle et spirituelle. Il s'associe à un autre sentiment ou à des émotions pénibles (peur, tristesse, angoisse, dégoût), comme par exemple, la peur de l'impuissance, d’être incapable, l’insécurité ou le sentiment de vide.
La honte est plus archaïque que la culpabilité, car elle est moins verbale. Elle est plus sensorielle et corporelle, comme par exemple, les yeux baissés et la tête basse. Elle se traduit dans le comportement par une immobilisation du corps. Elle apparaît quand nous nous sentons atteints dans notre intégrité, dans notre dignité. Elle est vécue de soi à soi. La culpabilité est le sentiment d’avoir commis une faute répréhensible, quelque chose de mal. Elle est liée au regard des autres.
Le sujet pervers narcissique, ou narcissique grandiose, nie la honte et la culpabilité, car il a subi dans son enfance des atteintes violentes à sa dignité, à son intégrité à cause d'humiliations, de culpabilisations répétées de la part d’une figure d’attachement. Il les a niée et les fait vivre à la victime afin de maintenir son déni de ses traumatismes et de ne pas ressentir ses blessures émotionnelles.
La victime souffre aussi de blessures émotionnelles liées à la honte et à la culpabilité durant son enfance. Elle ne s'est pas identifiée à son agresseur. Elle s'est figée dans la honte au niveau du corps et de l'esprit, avec une attitude de repli ou de soumission. Elle a appris à satisfaire autrui plutôt que de prendre en considération ses émotions, ses besoins et ses limites. Ou bien, elle s'est protégée de ses blessures liées à la culpabilité en se lançant des défis pour faire toujours mieux, être parfaite, la plus performante. Elle ressent de la colère. Elle la retourne contre elle sous forme de culpabilité ou cherche à prouver son point de vue en se justifiant.
Se libérer de la honte et de la culpabilité en tant que victime nécessite de prendre conscience de l'emprise subie de la part de la personnalité perverse narcissique ou narcissique grandiose. Cette libération demande d'acquérir des ressources pour retrouver l'estime de soi et la confiance en soi : développer des relations bienveillantes, soutenantes, valorisantes, par exemple, ou se remémorer des souvenirs valorisants.
Ecouter son corps, ses émotions est nécessaire pour sentir ce qui est bon pour soi, ce qui nous procure de la satisfaction et de l'estime de soi. Nous pouvons ainsi satisfaire le besoin de reconnaissance frustré dans l'enfance. Nous pouvons remplir notre réservoir d'amour pour soi grâce aux sensations, aux émotions agréables. L'identification des émotions passe la reconnaissance des sensations du corps. Ce sont les signaux de nos besoins frustrés.
Par exemple, Aurore ressent la culpabilité de "s'être fait avoir" dans plusieurs relations d'emprise successives. Elle s'en veut d'avoir vécu des relations chaotiques où elle s'est sentie maltraitée. Cette colère retournée contre soi renvoie à un besoin de respect et de justice frustré. Aurore prend en considération son besoin en apprenant à rassurer l'enfant en elle, la part sensible, émotionnelle de son moi. Pour y arriver, elle développe avec moi des ressources de sécurité, ancrées dans la mémoire du corps avec l'EMDR : s'imaginer avec ses enfants, à la plage. Dans cet état de sécurité, elle exprime à son enfant intérieure (la part vulnérable d'elle-même) qu'elle a appris à repérer les relations d'emprise et que dorénavant, elle va être attentive à ce qu'elle ressent, à prendre soin de ses besoins et à poser ses limites. Elle la rassure sur le fait qu'elle va écouter ce qui est juste pour elle. C'est un processus de re-parentage qui consiste à adopter une attitude de parent bienveillant, attentif, soutenant et réconfortant, envers l'enfant en soi. Cette dimension de l'enfant est toujours présente en chacun à travers les émotions, les besoins, les rêves, ... Cet enfant blessé en Aurore, à cause des humiliations subies dans l'enfance, a besoin d'aller mieux. Cette part sensible n'est plus dans l'attente d'amour et de reconnaissance extérieure si l'adulte en soi peut exercer un rôle de parent suffisamment bon pour l'enfant intérieur. Satisfaire ses besoins permet de poser ses limites et de ne plus s'attribuer l'entière responsabilité de ce qui arrive dans la relation. Cela permet de ne plus se laisser culpabiliser et dévaloriser par le sujet pervers narcissique ou narcissique grandiose. Celui-ci adopte un rôle de parent culpabilisant, critique envers la victime afin d'avoir le pouvoir sur elle. Celle-ci peut apprendre à ne plus être manipulable, car l'adulte en elle s'est renforcé en prenant du recul pour acquérir des ressources. Avec ces ressources, il peut analyser les jeux de manipulation sans se laisser piéger et il peut réguler les émotions de l'enfant intérieur afin de satisfaire ses besoins. Aurore a pris conscience qu'elle se lançait des défis en allant vers des partenaires idéaux à ses yeux. Elle les percevait dominants et dans la surestime de soi, harcelants, avec les comportements de la perversion narcissique. Elle admirait chez eux la confiance et l'estime de soi qu'elle aurait voulu acquérir. Mais, ceux-ci n'étaient pas capables de la valoriser et de la reconnaître dans ses besoins, dans ses émotions. Elle a découvert qu'elle donnait une apparence extérieure distante, car elle était en insécurité, hypervigilante. Elle a compris que ces hommes la percevaient comme un défi. Il s'agissait d'un lien traumatique où l'enfant en elle attendait toujours la reconnaissance que son père ne lui avait pas donnée. Elle a appris le langage des émotions et des besoins durant la psychothérapie afin de satisfaire les attentes de son enfant intérieure et afin de ne plus laisser un homme dominant nier sa valeur, comme ce fut le cas dans son enfance. Elle avait grandi avec la croyance qu'elle n'était pas capable, selon son père. Elle devait constamment se justifier aux yeux de certains hommes qui lui ressemblaient. Anxieuse, elle tentait de leurs plaire sans prendre soin de ses besoins, car enfant, elle était souvent seule, responsable de prendre soin de ses petites soeurs. Elle éprouvait des difficultés à rester seule en grandissant, sans le soutien émotionnel de ses parents. Elle a développé un attachement insécure envers ses proches, tantôt anxieux, tantôt évitant. Dans l'anxiété, elle était dépendante, en attente de reconnaissance et d'amour. Le plus souvent dans l'évitement, elle était distante, sur la défensive, vis à vis de ses émotions et de celles des autres. Elle pouvait organiser sa vie, mais ne savait pas prendre soin d'elle. Elle a appris à dialoguer avec les parts vulnérables d'elle-même, cette petite fille en elle, avec ses émotions et ses besoins frustrés. Elle a pris une photo d'elle, enfant, afin de se connecter à elle quotidiennement avec ces simples questions : "Que ressens-tu ? Pourquoi ? De quoi as-tu besoin pour te sentir mieux ?". Le coaching en thérapie polyvagale et la psychothérapie EMDR lui ont appris à se libérer de la honte et de la culpabilité issues de son enfance. Elle a pu davantage réguler ses émotions, prendre soin de ses besoins. Son attachement plus sécurisant avec elle-même l'a aidée à ne plus entretenir des relations d'emprise destructrice.
si ces descriptions vous parlent vous pouvez contacter Christine Calonne psychologue clinicienne et psychothérapeute EMDR +32 42 90 58 14 ou consulter son livre "Les victimes de pervers narcissiques, guérir le traumatisme", éd. Ellipses, col. 100 questions/réponses ou Récits et témoignages.